28 novembre 2018
Services essentiels locaux Energie France

3 questions à Juliette Darlu, responsable de projets « Énergie » au Gret

Actualité

Diplômé d’AgroParisTech et d’un master en sciences et politiques de l’environnement, Juliette Darlu a travaillé pour l’Agence française de développement en Éthiopie et la Fondation Énergies pour le monde avant d’intégrer le programme « Accès à l’énergie » du Gret en 2017. Au sein de l’ONG, elle pilote, suit et monte des projets en lien avec les problématiques d’énergies renouvelables et d’électrification hors réseau.

Quels sont les grands enjeux de développement liés à l’accès à l’énergie ? 

Actuellement, trois milliards de personnes dépendent de la biomasse (bois de feu et autres combustibles issus du vivant) pour leurs besoins vitaux : se nourrir, rendre l’eau potable, se chauffer. Une grande partie de ces personnes habitent en Afrique subsaharienne et sont en situation de pauvreté et de précarité énergétique. À Nouakchott, capitale de la Mauritanie, les femmes dépensent jusqu’à 25 % de leur budget pour acheter du charbon de bois, qui peut parfois provenir du Mali !
Un milliard de personnes n’ont pas non plus accès à une vraie source fiable d’électricité. À Madagascar, où dans certains villages on s’éclaire encore parfois à la lampe à pétrole, 89 % des ménages ruraux n’ont pas accès à un réseau. L’accès à des énergies durables et renouvelables représente un vrai enjeu de développement, au même titre que la santé, l’éducation, le développement économique ou encore l’emploi. Sans compter qu’il permet de répondre aux défis écologiques ainsi qu’à la lutte contre le changement climatique.

Autour de quels axes s’articule le programme « Accès à l’énergie » du Gret ? 

Il s’articule autour de trois grands axes : « biomasse énergie », « accès à l’électricité » et « énergie et territoire ».  Pour l’axe « biomasse énergie », le Gret intervient sur la sécurité énergétique des ménages par la diffusion de foyers et de combustibles renouvelables. Il incube par exemple une entreprise sociale de foyers améliorés à charbon en Mauritanie, ainsi que des entreprises de valorisation d’une plante invasive en biocharbon, le Typha.
L’axe « accès à l’électricité » intègre la mise en œuvre de programmes d’électrification rurale (mini-réseaux ou plateformes solaires), en favorisant les coalitions d’acteurs autour du service public et en renforçant le rôle des autorités locales. Par exemple, à Madagascar, deux mini-réseaux hydroélectriques sont en cours de construction, dans l’optique d’alimenter plus de 40 000 personnes.
Le dernier axe, « énergie et territoire », est en pleine croissance. En effet, l’énergie est un vecteur essentiel par lequel le Gret passe pour favoriser le développement économique local. Ainsi, nous inscrivons nos actions à l’échelle d’une commune, d’un bassin-versant pour accompagner leur transition énergétique. Nous appuyons par exemple une commune du Burkina Faso dans la planification de sa stratégie de développement des énergies renouvelables.

Quelles sont les approches innovantes développées par le Gret sur les questions d’accès à l’énergie ?

Nous cherchons à mettre en œuvre des solutions organisationnelles qui favorisent la prise de décision des citoyens, usagers et consommateurs, souvent exclus des schémas de gestion des services où le duo public-privé domine.
En faisant appel à des méthodes de design thinking, nous faisons participer les usagers et partenaires locaux à la conception des produits qu’ils vont fabriquer, vendre ou utiliser. C’est le cas pour les foyers améliorés Fayda en Mauritanie, ou le biocharbon de Typha au Sénégal. Nous favorisons aussi le transfert de technologie Nord-Sud sur des innovations techniques. Par exemple, nous collaborons avec l’entreprise Guinard Energies pour le test in situ d’une hydrolienne de petite capacité à Madagascar, une solution qui peut en partie répondre aux enjeux d’électrification rurale.

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