25 octobre 2019
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Des clés pour mieux intégrer les enjeux environnementaux et sociétaux dans les projets d’électrification rurale

Actualité

Le Gret, en association avec les bureaux d’études Burgeap, Nodalis et Enea Consulting, a participé à la réalisation d’une étude commanditée par l’Agence française de développement (AFD) sur les solutions d’accès à l’électricité hors-réseau.

Cette étude, réalisée entre 2018 et 2019, avait pour objectif d’analyser les facteurs de succès et les obstacles des programmes de déploiements des kits solaires et les mini-réseaux dans sept pays (Burkina Faso, Cambodge, Kenya, Madagascar, Maroc, Mauritanie et Sénégal), en termes de stratégies institutionnelles et réglementaires, de politiques tarifaires, de composantes technico-économiques et d’enjeux environnementaux, sociétaux et de gouvernance. Des recommandations ont été formulées à destination de l’AFD et des acteurs institutionnels. La synthèse de cette étude a également été présentée lors d’un événement organisé par l’Alliance Sahel en octobre 2019 sur l’« Accès à l’énergie dans les pays du G5 Sahel ».

Des enjeux insuffisamment pris en compte

Pour faciliter l’analyse du nombre important de données et de sujets à traiter, le Gret a proposé une méthodologie basée sur la formulation initiale d’hypothèses issues des expériences des membres du consortium, qui ont ensuite été validées et/ou nuancées au cours de l’étude. Une phase d’étude bibliographique a ainsi été suivie d’une phase d’entretiens auprès d’acteurs clés. En complément des questions méthodologiques, le Gret a plus particulièrement travaillé sur les enjeux environnementaux, sociétaux et de gouvernance.

Le constat est que ces enjeux ne sont pas suffisamment pris en compte par les acteurs du secteur, notamment par les acteurs privés. Le bilan carbone et plus largement l’empreinte écologique des solutions d’électrification impliquant du stockage ne sont pas neutres et peuvent même devenir significatifs si elles sont diffusées à grande échelle. Les questions relatives à la gestion des déchets engendrées par les solutions d’électrification hors-réseaux sont éludées dans la plupart des projets ou initiatives. Les dispositifs d’appui au développement de la demande en énergie, notamment pour les usages productifs, sont insuffisants. Enfin, les autorités locales restent globalement écartées de la gouvernance de l’électrification.

Des pistes à explorer

Ce constat nécessite de renforcer les capacités des parties prenantes de l’électrification rurale, tant sur la performance du service que sur ses impacts sociaux et environnementaux. Voici quelques-unes des pistes d’action proposées :

  • Pour intégrer les aspects environnementaux, sociétaux et de gouvernance, l’accompagnement de toutes les parties prenantes de l’écosystème de l’électrification rurale est nécessaire. Celui-ci doit être intégré dans les plans d’affaires d’opérateurs privés, les financements des bailleurs et ne pas être considéré comme accessoire, car il permet de mieux assurer la pérennité du service d’électricité mis en place.
  • Il faut adapter la réglementation environnementale : optimiser le bilan environnemental lors du dimensionnement des infrastructures ; développer des normes privilégiant voire imposant le choix d’équipements de qualité, réparables et éco-construits ; améliorer la réglementation concernant les déchets d’équipements électriques et électroniques (D3E) ; renforcer les filières de collecte et traitement, éventuellement en les intégrant dans un circuit de traitement formel.
  • Il est nécessaire de renforcer l’appropriation et la gouvernance locale, en associant les autorités locales et traditionnelles et les usagers dans les décisions, dans une logique de renforcement de capacité.

Ces recommandations, notamment la dernière, paraissent évidentes pour les équipes du Gret qui se sont toujours efforcées d’impliquer les parties prenantes locales. Cependant, cette approche de « proximité » ou « sur-mesure » était considérée comme limitante pour permettre un véritable changement d’échelle vers l’universalisation de l’électricité.

L’étude réalisée pour l’AFD, et validée par celle-ci, démontre que l’ingénierie sociale et environnementale est une des clés pour assurer la pérennité des projets d’électrification rurale. Il est heureux que l’AFD s’empare officiellement de ces enjeux. Il reste à savoir comment ces recommandations seront prises en compte et appliquées alors que l’accès à universel à l’électricité pour 2030, visé par l’Objectif de développement durable n°7 (« garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable »), reste encore un immense défi.

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