30 mars 2021
Insertion et emploi Politiques de coopération et de développement France

3 questions à… Olivier Bruyeron, président de Coordination SUD

Actualité

Directeur général du Gret de 2013 à 2019, Olivier Bruyeron a été élu le 26 novembre 2020 président de Coordination SUD, et a depuis rejoint le conseil d’administration de l’Agence française de développement (AFD). Il revient aujourd’hui sur les enjeux de son engagement auprès des ONG françaises et de la politique d’aide publique au développement (APD).

Après plus de 25 années passées au Gret, d’abord en tant que stagiaire, chef de projet expatrié, puis directeur général, comment abordez-vous cette nouvelle fonction au sein de Coordination SUD ?

Je démarre ce mandat de trois ans avec beaucoup d’humilité face aux responsabilités qui y sont associées. Bien que je sois membre du conseil d’administration depuis un peu plus de trois ans, je découvre progressivement l’ampleur de certaines activités menées par Coordination SUD, notamment en termes d’appui aux membres comme le développement de l’offre de formations, la gestion du fonds Frio, le service emplois, etc. Des activités qui ont eu le mérite de s’adapter face à la pandémie de Covid-19 et, ainsi, de se poursuivre tout au long de l’année 2020. Je prends également pleinement conscience de la diversité et de la formidable richesse du milieu des organisations françaises de solidarité internationale. Enfin, je m’implique progressivement dans les différents sujets de réflexion et de plaidoyer du collectif.

Puisque vous abordez le sujet du plaidoyer, pouvez-vous nous illustrer, sur la base d’un exemple concret, le travail de plaidoyer réalisé par Coordination SUD ?

Tout d’abord, je tiens à préciser que Coordination SUD travaille et réalise ses actions de plaidoyer en s’appuyant sur ses membres, et grâce au travail de coordination et d’animation réalisé par son secrétariat. Un exemple d’actualité est le travail conduit à propos du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, dont l’examen est actuellement en cours au Sénat français.

Un groupe de travail a été constitué il y a environ deux ans, composé des membres du réseau de Coordination SUD intéressés par le sujet. Ce groupe a suivi tout le processus d’élaboration de la loi et a interagi, de manière structurée, avec les parties prenantes dès 2018, c’est-à-dire bien en amont de son passage en conseil des ministres fin 2020.

Puis, à chaque étape de son examen à l’Assemblée nationale en ce début d’année, nous avons été auditionnés par le rapporteur de la loi, les membres de la commission parlementaire chargée de travailler sur le projet, ainsi que par divers groupes parlementaires. Nous avons systématiquement proposé des évolutions précises et argumentées du projet, allant jusqu’à rédiger des propositions d’amendements aux parlementaires.

Cela a porté ses fruits, le texte a évolué positivement sur pratiquement chacun des cinq axes de notre plaidoyer, à savoir : les orientations politiques de l’action publique française en matière de développement solidaire, son financement, les questions de transparence et de cohérence des autres politiques, la reconnaissance de la place des organisations de la société civile, et l’importance à donner à la diplomatie féministe et aux questions de genre plus globalement.

Le projet de loi passe maintenant au Sénat, mais il est encore à améliorer sur différents points. Nous échangeons avec les sénateurs et sénatrices et sommes là encore force de propositions concrètes et argumentées. Le travail continue…

Après une année marquée par la pandémie de Covid-19, comment les ONG françaises peuvent-elles influer sur les politiques de sortie de crise et de renforcement de la résilience internationale ?

La crise actuelle met en exergue nos interdépendances et nos besoins de solidarité. Si elle l’illustre tristement dans le domaine sanitaire, d’autres exemples récents montrent à quel point ces interdépendances sont nombreuses. Elles portent évidement sur les questions climatiques, sociales, financières, de ressources naturelles… Elles suscitent de l’inquiétude.

Mais, à titre personnel, il me semble qu’elles montrent aussi à tous et toutes que l’humanité est arrivée à un stade où il est impératif qu’elle pense le changement et la résilience à la fois à l’échelle locale et globale. Le repli sur soi n’est pas une réelle option. Ignorer ce qui se passe ailleurs – ce qui n’était déjà pas acceptable – est devenu une posture difficilement défendable. Nos parlementaires l’ont compris puisqu’ils ont voté à l’unanimité la loi sur le développement solidaire, en pleine période de crise, et cela alors même qu’elle acte une croissance des moyens dédiés à la solidarité internationale. C’est une avancée réelle pour Coordination SUD et ses organisations membres.

Au-delà, les organisations de la société civile montrent dans cette crise leur formidable capacité d’action. Elles sont engagées pour un développement durable et font vivre les solidarités en agissant auprès des populations, en créant du lien social, et en portant un projet de société qui fait sens, centré sur la lutte contre la pauvreté et les inégalités, sur le respect des droits humains. Elles sont dès lors des interlocutrices crédibles, à condition de se coordonner pour contribuer à l’élaboration des politiques publiques de sortie de crise et du « monde d’après », tant au niveau national qu’international.

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