GIRE locale
Des plateformes citoyennes pour préserver les ressources en eau au Sénégal
Appui technique, Animation de réseaux, Etude
Sénégal

La surexploitation des eaux souterraines dans la zone des Niayes entraîne une raréfaction des ressources en eau et de nombreux conflits sociaux. Une approche ascendante, inspirée par la théorie des communs, est mobilisée par le Gret et ses différents partenaires pour répondre à ces enjeux de justice sociale et environnementale.

 

 

Des menaces sérieuses sur les ressources en eau, aux conséquences multiples graves

Située sur la frange littorale entre Dakar et Saint-Louis, la zone des Niayes est le plus gros foyer de production maraîchère du pays. Environ 60 des fruits et légumes produits au Sénégal et 80 % des exportations horticoles proviennent de cette région. Ses ressources en eau, presque exclusivement souterraines, alimentent une partie de la capitale en eau potable.

Depuis les années 1950, les industries extractives ont également investi cette région. Elles exploitent le phosphate mais aussi, plus récemment, le zircon et d’autres minerais lourds. Ces activités minières sont directement en compétition avec l’agriculture et l’élevage pour le foncier et l’exploitation des ressources naturelles. Cela engendre des tensions dans la zone. L’arrivée récente des agroindustriels aggrave également la situation.

La surexploitation des ressources en eau, par ces différentes activités économiques, induit une baisse alarmante, en quantité et en qualité, des ressources en eau. Avec pour conséquences la salinisation de l’aquifère profond (par l’intrusion d’eau marine), la baisse du niveau des nappes et la pollution de l’aquifère superficiel. Ces pollutions, dues à l’utilisation de pesticides et aux rejets des industries minières, entraînent aussi conséquence une baisse de la fertilité des sols. Il est estimé que la nappe superficielle diminue de 7cm par an, et la nappe profonde de 45 à 49 cm. Les hausses de température liées au changement climatique et la croissance démographique vont accentuer ces phénomènes. Ces dernières sont sources de tensions sociales et de risques sanitaires et alimentaires.

 

Une approche par les communs pour répondre aux enjeux autour des ressources en eau

Le Gret mène depuis 2017 un projet en partenariat avec l’Etat sénégalais, à travers la Direction de la gestion et de la planification des ressources en eau (DGPRE). Le but est de contribuer à construire les conditions d’une gouvernance partagée qui puisse aller vers la sécurisation durable et équitable des usages de l’eau, tout en préservant les écosystèmes à l’échelle des Niayes. A travers une approche par les communs, il s’agit d’expérimenter une gestion collective et intégrée des ressources en eau prenant en compte les enjeux écologiques, économiques et sociaux liés aux ressources et accordant aux acteurs locaux un droit de décision.

Les enjeux du « faire commun » autour des ressources en eau dans les Niayes :

  • Inverser la dynamique de surexploitation – c’est-à-dire limiter les prélèvements et favoriser la recharge des nappes – et de pollution des ressources en eau du système aquifère des Niayes.
  • Assurer un partage équitable des ressources entre les différents usages et usager.ère.s.
  • Renforcer la résilience des populations face aux effets du changement climatique.
  • Expérimenter un processus démocratique innovant et renforcer la citoyenneté.
  • Gérer l’eau de manière holistique à l’échelle d’un territoire en reliant les enjeux de la ressource à ceux des services (eau potable, assainissement, eau agricole).

 

Le processus engagé pour une gouvernance partagée des ressources en eau avec l’appui du Gret

Le projet porté par le Gret a pour objectif de co-construire des solutions et des modalités d’actions adaptées au contexte, efficaces et inclusives. Il s’agit de renforcer une gouvernance partagée de la ressource entre les usager·ère·s et les institutions locales et nationales. À l’échelle de cinq communes, l’équipe du projet a contribué à la structuration de Plateformes locales de l’eau (PLE). Ces arènes de gouvernance communale et intercommunale regroupent toutes les personnes actrices du territoire intéressées par la démarche. Les membres des plateformes doivent être représentatives des intérêts de l’ensemble des acteurs et actrices de la zone (agriculteurs, éleveurs, associations d’usagers de l’eau potable, opérateurs privés, services techniques de l’État, collectivités territoriales, ONG, chercheurs, médias, etc.). Leur objectif est de contribuer à gérer de manière durable, équitable et efficace les ressources en eau de leur territoire.

« Les femmes doivent jouer un rôle important dans la GIRE car ce sont elles qui s’occupent des corvées d’eau. Elles font également du maraîchage au même titre que les hommes. Donc elles doivent participer massivement aux instances de gouvernance sur l’eau, dont la PLE, et y occuper des postes de responsabilité. »  Awa Gueye, vice-présidente de la PLE de Diender-Kayar Une attention particulière a été portée Cela s’est notamment traduit par des ateliers d’expression théâtrale.

Conjointement à la construction de ses modalités de gouvernance, chaque plateforme a identifié les enjeux liés à la gestion, à la préservation et aux usages des ressources en eau de son territoire. Elles ont conçu en fonction, un Plan local de gestion intégrée des ressources en eau (PLGIRE). Ces instruments de planification territoriale détaillent les actions à conduire pour améliorer la gestion des ressources en eau et des usages associés.

 

Résultats à date

  • Les acteurs locaux disposent d’une meilleure compréhension des problématiques liées à l’eau et ont pris conscience de la nécessité de tendre vers une gouvernance partagée des eaux souterraines des Niayes.
  • Trois plateformes locales ont été mis en place et représentent les intérêts des acteur·rice·s des communes d’intervention.
  • Les conditions favorables à la mise en place d’un dialogue entre les PLE et les industriels des Niayes, en particulier les compagnies minières, ont été instaurées.
  • Les premières activités prévue par les plateformes pour gérer durablement les ressources en eau ont été mises en œuvre. Il s’agit par exemple du recensement des ouvrages hydrauliques, d’une enquête sur les pesticides et l’installation de cordons pierreux – pour limiter le ruissellement et favoriser l’infiltration des eaux de pluies principalement). Certain·e·s agriculteur·rice·s, initié·e·s aux principes agroécologique, se sont engagé·e·s dans de nouvelles pratiques. Ils utilisent des engrais naturels et mobilisent des techniques de gestion économe en eau pour l’irrigation.

Les prochaines étapes du projet :

En 2022, le projet entre dans sa 3e phase avec pour objectif de répondre aux enjeux suivants :

  • Etendre le dispositif de gouvernance partagée des ressources en eau à l’ensemble du système aquifère des Niayes pour réduire efficacement la surexploitation et la pollution de l’eau de la zone (création de 11 nouvelles plateformes de l’eau). Il est également prévu d’accompagner la formation d’un cadre de concertation à l’échelle de la zone des Niayes qui fédérerait l’ensemble des plateformes par une démarche ascendante.
  • Informer et susciter l’engagement des populations au sens large à travers la mise en place de campagnes d’information et d’échanges sous la forme de théâtre-forum ou encore de ciné-débats.
  • Conduire des actions de préservation des ressources (campagnes de reboisement, installation de cordons pierreux, promotion des pratiques agroécologiques).
  • Renforcer les capacités de plaidoyer des plateformes pour faire évoluer la règlementation.
  • Capitaliser les enseignements pour favoriser leur diffusion au Sénégal.

 

Projet en cours
Date de début 01/09/2017 date de fin 30/04/2026
Budget : 2 396 149 €
Contact projet :
Hamet, DIALLO
Contact projet :
Valérian Juillet

Des plateformes locales de l'eau pour une gouvernance partagée de la ressource au Sénégal

Partenaires du projet